Quand le football devient l’opium du peuple !
Je sais que je vais même débuter l’article ci par où nor pèr ! Un piment épicé de joie vibre dans mon cœur ! En tout cas allons seulement : ça sort comme ça sort, Hallatoul comme disent mes amis égyptiens…
Avant la finale de la CAN 2017, il fallait être en Egypte pour comprendre que le football ici c’est plus qu’une passion mais une religion. Le foot ici c’est « l’opium du peuple » comme dirait Karl Marx.
Avant le choc pharaonique !
A 11h : Lorsque je me rends chez le boutiquier du quartier pour acheter les épices pour sauter un petit repas, je vois des gamins d’environ 7 ans venir acheter des Vuvuzelas. L’épicier se rendant compte que je souriais, me demande : « Cameroonii, Ifriqiya… ? ». Quand il se rend compte que je suis un camerounais, l’équipe contre laquelle ils livreront la finale, il se moque en me signifiant qu’il vont nous renvoyer dans la forêt ! J’esquive l’attaque et je rétorque que le meilleur gagnera en le prévenant que cela ne sera pas aussi facile qu’il le croit.
15H56 : Dans l’après-midi, je suis moi en train de « flex » devant un article quand des hourras répétitifs me perturbent. Je descends dans la rue pour « look » et le Rouge-Blanc-Noir envahi mon champ visuel. Des écrans géants s’installaient de part et d’autres à chaque coin de ruelle. Les salons de café et de Chicha espaces classiques, pour regarder les matchs étaient bondés dès 18h. Tandis que certains jeunes s’amusaient à défiler avec le drapeau égyptien dans des voitures, d’autres soufflaient à gorge déployée dans leur vuvuzela ! Laissez moi vous dire que même les femmes s’y mettaient également ! Un concert cacophonique mais dont la mélodie finit par émerger à force d’écouter.
Vers 19h17 : les rues ne sont plus bondées, elles sont inondées ! Les femmes ont entraîné leurs petits avec elles. Des familles entières sont là scotchées devant un écran, qui crache des paroles incompréhensibles pour moi mais qui incitent, suscitent et excitent l’émoi des fans ! On voit des enfants qui se sont tatoués le visage aux couleurs de l’Egypte.
20h : La tension est à son comble ! Tout le monde est présent : même la grand-mère a rejoint les petits-fils devant l’écran. Les rues deviennent des églises à ciel ouvert où les fans tels des ouailles, attendent impatiemment le lancement de la compétition pour assister à la « chasse » du Lion par le Pharaon. Ils écoutent cérémonieusement le rapporteur du match comme un abbé ! Chaque mot déclenche un soupir, chaque phrase les fait tressaillir davantage.
20h30 : On retransmet la séquence vidéo où notre capitaine Rigobert Song alias Maniang perd la balle qui permettra au joueur égyptien Zidane d’inscrire le but qui donnera la victoire à l’Egypte lors de la CAN 2002. Mamaaaaa ! C’est l’enjaillement que tu voulais voir ! Ils commencèrent à festoyer et à célébrer avant même le début de la rencontre car rassurés par cette belle réminiscence ! Oubliant cependant que « souvenir » et « devenir » riment certes mais ne friment pas ensemble ! Ils ignoraient que l’effervescence d’une réminiscence est périlleuse : « on ne vend pas la peau du Lion avant de l’avoir tué » ! Mais surtout qu’un animal blessé devient plus dangereux qu’un crotale !
Des supporters caméléons… !
21h : Au lancement du match, la tension est à son apogée ! Les grands parents, les parents, les enfants, les voisins et même les boutiquiers abandonnent leurs activités et se concentrent, comme durant une prière, devant leur écran. Le regard fixe, le corps tendu, ils attendent l’instant de délivrance… Qui ne tardera d’ailleurs pas avec l’inscription du premier but égyptien ! Mamaaaaa ! Ce sont les bruits que tu voulais entendre ! Déchaînés, ils créèrent un vacarme assourdissant tandis que nous nous plongions dans un silence éloquent, pareil à une veillée mortuaire !
Ah Mofmidé, c’est ici que j’ai confirmé que les camerounais sont de vrais caméléons: il fallait voir comment des insultes fusaient par ci et par là à chaque fois que nos joueurs dégommaient (comme si c’était facile) ! C’est même un collègue tchadien du nom de Muna Sawa qui réussit à nous redonner le sourire et la confiance en l’équipe. Et il prophétisa même l’issue finale du Match : Cameroun 2-1 Egypte !
Si l’égalisation de Nicolas Nkoulou a mis du sel dans la sauce égyptienne, le but victorieux majestueusement inscrit par Vincent Aboubakar sera le piment qui finalisera la cuisson de la sauce : on était prêt à consommer la victoire ! C’est la joie que tu voulais voir : Burkinabé, Béninois, Tchadiens, Congolais…criaient, sautaient, chantaient à tue-tête car agréablement surpris par le retour de l’équipe ! Unis derrière les lions, nous ne formions plus qu’une nation : nous avons paniqué, stressé puis célébré… Ensemble !
Du piment au ciment social.
Au regard du contexte, nos manifestations de joie se devaient d’être contrôlées et mesurées car nous étions sur le territoire des vaincus et nous savons tous que la défaite et la colère sont de mauvaises conseillères… Lorsqu’on met : Défaite + Colère + Samara = Indigestion ! La sauce devient très pimentée, étouffante et difficile à avaler surtout pour des fanatiques du ballon rond !
Retourner dans nos domiciles respectifs devint donc un parcours du combattant ! Ignorant la réaction des supporters égyptiens, nous craignions des représailles ! J’ai d’abord commencé par changer mon maillot des Lions indomptables pour le mettre à l’envers : owoo prévenir vaut mieux que guérir ooh … En chemin, un égyptien s’adressa à une collègue camerounaise :
– « Enta Camérouni ? (Es tu camerounaise ?)
– Là, (non! ) répondit-elle avec empressement !
Ce refus circonstanciel d’appartenance à la nation camerounaise me fit immédiatement penser à Pierre reniant involontairement sa relation d’avec Jésus-Christ afin d’échapper à… la persécution ! C’est sur ces entrefaites que nous rejoindrons paisiblement nos domiciles. Plus de peur que mal mais la fierté dans l’âme. Discipline + Détermination = Victoire ! Bien que Fabrice Ondoa soit bon ou ait un don comme Christian Bassogog, c’est à toute la tanière que revient la victoire ! Les égyptiens, désenchantés, désillusionnés, déçus, désemparés, déboussolés… n’en revenaient pas… Ils venaient de perdre la CAN face à des Samara (Noirs) et c’est ce qui, je crois les blessent le plus !!!
Après l’euphorie de la victoire, revient la dysphorie notoire du « problème anglophone » avec les violations des libertés fondamentales qui gangrènent actuellement mon beau pays ! Ne soyons point distrait, suivons et impliquons nous activement dans la marche en cours de l’Histoire nationale…
Un seul mot Maestro, chapeau !!!
Merci boss… Un lion reste un lion …
l’article est apanage d’un écrivain. Merci pour tout.
You are welcome my dear ! C’est un plaisir !
bon billet
Merci et à bientôt !