Pour un équitable accès des femmes à l’arène politique

         La question de l’intégration du genre dans tous les domaines de la vie, notamment le domaine politique, est à prendre avec beaucoup de considération car la réalité montre que, dans toutes les actions qu’on mène socialement, il y a une répartition inéquitable entre les êtres humains. Pourtant la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme dit clairement que les êtres humains sont nés égaux en droit et  en devoir. Mais dans la répartition des taches ou des ressources, dans la prise de décision ou l’occupation des postes à pouvoir, il y en a qui sont réservées à une catégorie de personnes.  Bref il y a dans tous les cas marginalisation. Cette marginalisation se manifeste par une sous-représentativité au niveau des postes décisionnels.

Les femmes demeurent sous-représentées à tous les niveaux du pouvoir. En particulier dans la plupart des ordres de gouvernement.  Les femmes sont fortement moins représentées parmi les adhérents dans beaucoup de partis politiques et donc parmi les élus. Les lois tentent de rétablir un certain équilibre, parfois maladroitement, parfois malhonnêtement. La parité en politique est une parfaite illustration d’une utilisation malhonnête de cette lutte contre la sous-représentation des femmes en politique. À l’échelle mondiale, les femmes ne comptent que pour 17% des responsables élus dans les parlements et les ministères nationaux. Encore moins de femmes ont réussi à atteindre les plus hauts échelons gouvernementaux. En 2010, sur les 150 chefs d’État élus dans le monde, seulement 7 étaient des femmes ; sur les 192 chefs d’État, seuls 11 étaient des femmes. S’agissant du Cameroun en Afrique centrale on constate que seules 10 femmes existent parmi les 180 parlementaires soit 5,5% de femmes pour 94,5% d’hommes ; parmi les 626 conseillers municipaux, on ne compte que 114 femmes, soit 18,21%. Au sein du gouvernement, il n’y a que 2 femmes sur les 45 membres du Cabinet. En outre, des 37 ministères que compte le Cameroun, il n’y a que 04 qui sont gérés par les femmes. Si nous nous limitons seulement à ces quelques exemples, on comprend que la question d’intégration du genre dans le domaine politique, reste à revoir.

D’après les statistiques présentées par l’ONU au sujet de l’intégration du genre dans la politique, il ressort que de 1995 à 2015, le pourcentage des parlementaires femmes dans le monde a doublé parce qu’on est parti de 11.3 % en 1995 à 22% en 2015. Mais il est nécessaire de dire en même temps que ce pourcentage est très faible et insignifiant si on se focalise sur le nombre des femmes qu’on peut retrouver dans le monde entier. De nos jours, 10 Chefs d’Etat et 14 Chefs de gouvernement dans le monde sont des femmes. La répartition des femmes au pouvoir et par région, donne les résultats suivants : pour les pays Nordiques, nous avons  41.5%; Amérique 26.3%; Europe sans les pays nordiques  23.8%; Afrique sub-saharienne 22.2%; Asie 18.5%; Moyen-Orient, Afrique du nord 16.1% et Pacifique 15.7%.

En Afrique, seul le Rwanda reste actuellement le pays qui a le plus grand nombre des femmes parlementaires à savoir 56% et de 36% au sein du gouvernement. Le Cameroun brille par la faible sinon l’invisibilité des femmes dans les postes à responsabilité politique. La gente masculine se rassurant qu’elles s’attellent toujours à occuper des postes dont les attributions les cantonnent dans le domaine de la famille, de l’éducation et à quelques postes dont les portées n’ont pas d’effets directs et immédiats sur le cours de l’action politique. L’aporie des femmes dans ces postes stratégiques trahit un manque de confiance ou une mésestimation (discriminatoire ?) des valeurs et compétences de la Femme qui n’est perçue que sous le prisme de la douceur et partant de la faiblesse dans ses prises de positions.  Or l’arène politique étant une scène de combat pour titans, « on » considère donc les femmes comme inaptes à y avoir accès. Cela est d’ailleurs visible à travers les partis politiques car les femmes qui en dirigent n’atteignent pas les doigts d’une main. Cependant l’expérience a montré que certaines femmes lorsqu’elles occupent certains postes administratifs, sont plus adaptées que certains hommes et jouent correctement leur rôle.

Pour mettre fin à cette marginalisation des femmes, ou du moins pour améliorer cette condition, plusieurs organisations (surtout des femmes), ont défini  des stratégies d’intégration du genre dans ce domaine pour qu’il y ait au moins équité : il s’agit des ONG comme  le Centre des Femmes pour la Promotion et le Développement(CFPD), une ONG basée dans la province du littoral, l’Organisation Camerounaise des Femmes et des Droits de la Personne (OCFDP), Organisation Camerounaise des Femmes  pour la Défense des Droits Humains (OCFDDH), l’Association Camerounaise  des Femmes Juristes, dirigée par Mme Félicité Moutomé  etc. Ces associations constituées de femmes et d’hommes ont mis sur pied des moyens et des techniques pour collecter les informations et organiser des séminaires de portée générale ou spécifique pour guider  l’analyse entre les genres  afin de permettre leur intégration dans la politique camerounaise. Plusieurs formations sur le genre ont été organisées  pour  attirer l’attention sur les multiples rôles sociopolitiques  que peuvent  jouer la femme dans la société et l’influence de leur intégration dans la politique. Grace à l’UNIFEM[1], une étude sur l’intégration de la dimension du genre  dans la constitution du code électoral a été  réalisée par l’association des femmes juristes. Ainsi nous nous rendons que ces ONG de même que la société civile, veulent accroître la capacité de décision et d’action individuelle et collective des femmes afin d’améliorer les résultats, les institutions et les choix publics.

Femme leader en Inde_Afropolitanis
Femme leader en Inde

Quel  que  soit  le  pays  ou  la  culture considérée,  il  existe  des  différences  dans  la  capacité qu’ont  les  hommes  et  les  femmes  à  effectuer  des  choix, généralement  au  détriment  des  femmes.  Ces  différences liées au genre ont un impact sur le bien-être des femmes mais  aussi  sur  toute  une  série  de  situations  concernant leur  famille  et  la  société  en  général.  Donner  aux  femmes  les  moyens  d’agir  sur la  scène  politique  et  dans  la  société  peut  se  traduire par  une  modification  des  choix  publics  et  amener les  institutions  à  mieux  représenter  une  plus  grande diversité  d’intervenants.  A titre d’illustration, le  suffrage  des  femmes  aux États-Unis   a   conduit   les   responsables   de   l’action publique  à  porter  leur  attention  sur  la  santé  juvénile et  la  santé  maternelle  et  a  contribué  à  réduire  de  8  à 15  %  la  mortalité  infantile.  En  Inde,  la  participation des femmes aux décisions publiques locales s’est  traduite  par une  augmentation  de  la  fourniture  de  biens  publics et un recul de la corruption. Dans  de  nombreux  pays riches,  l’augmentation  du  taux  d’activité  des  femmes et  leur  présence  en  plus  grand  nombre  à  des  postes  de responsabilité  politique  ont  contribué,  conjointement, à refondre la manière dont la société conçoit l’allocation du temps entre le travail et la vie de famille en général et à l’adoption d’une législation du travail plus favorable à la famille.

Bref, pour éliminer les obstacles qui empêchent les femmes d’accéder au pouvoir et à la prospérité, il faut une approche de partenariat à tous les niveaux. Il faut une collaboration étroite avec les gouvernements, les institutions, les collectivités et les familles. En outre, si les femmes sont présentes en nombre et à des postes importants de gouvernement pendant ces dernières années, c’est justement grâce aux multiples ONG que les femmes créent pour se trouver une place au soleil. La véritable équité de traitement en matière de représentation politique se trouve dans la proportionnalité et non dans la parité : s’il y a 35 % de femmes parmi les adhérents d’un parti politique, ce parti doit placer 35 % de femmes sur ses listes électorales. Cette vision politique ne supporte aucun choix basé sur un critère identitaire. Ce sont la compétence, l’implication et la volonté qui doivent être prises en compte.

 

[1] Le Fonds de développement des Nations unies pour la femme (UNIFEM) est une agence spécialisée de l’Organisation des Nations unies (ONU) et est associé au Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). Son rôle est de promouvoir la participation des femmes à la vie économique et politique des pays en voie de développement et d’améliorer la condition des femmes à travers le monde.

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