Les dérives du marxisme en Afrique
Tout au long de cette ouvrage, la question à laquelle le chercheur tente d’apporter une réponse satisfaisante est la suivante :
« Existe-t-il une fatalité unilinéaire du développement capitaliste ou est-il possible aux pays agraires à structures de production et de gestion communautaire et à institutions de propriété collective, non encore entièrement détruites par le colonialisme, de construire le socialisme en élaborant un appareil industriel sans passer par une phase d’accumulation capitaliste ? »
Pour accomplir son projet, il commencera par nous présenter la spécificité et l’universalité de la pensée marxiste, ensuite la connaissance du passé du monde négro-africain….
La conscience transformatrice occidentale
La conquête et la domination occidentale du monde négro-africain coïncident avec la naissance du capitalisme dont la base est la propriété privée. En effet, à la suite de la dissolution de la féodalité, les européens entreprennent de transformer les modes de production des parties du globe terrestre qu’ils conquièrent en modes de productions favorables au capital. Ils poseront ainsi le capitalisme comme un mode de production essentiel et naturel en Afrique où le pouvoir financier impérialiste agresse les économies, les ressources naturelles et matérielles, et transgresse les barrières locales et frontières nationales pour la constitution d’un marché mondial orienté vers une maximalisation du taux de profit, but ultime de l’idéologie capitaliste.
Le temps est l’autre équation nécessaire pour l’expansion exponentielle du capital car la réduction avec les progrès scientifiques et techniques (moteur à vapeur…) va permettre l’accélération et l’intensification des échanges. C’est dans cette perspective que seront engagés les projets de construction des voies de communication notamment à travers la construction des lignes de chemins de fers, des routes et les divers investissements coloniaux dont l’Afrique sera bénéficiaire. Toutefois, nous ne devrions pas nous laisser séduire par ces projets car comme nous le verrons avec Lénine dans L’Impérialisme, stade suprême du capitalisme[1] : « La construction des chemins de fer semble être une entreprise simple, naturelle, démocratique, culturelle et civilisatrice aux yeux des colonisateurs pour masquer la hideur de l’esclavage capitaliste. Mais en réalité, « les liens capitalistes qui rattachent par mille réseaux ces entreprises à la propriétés privées ds moyens de production en général, ont fait de cette construction un instrument d’oppression pour un milliard d’hommes ».
Le colonialisme et le christianisme seront dès lors les bras armés du capitalisme. Le premier, se fera avec la violence militaire et l’école coloniale où l’usage de la mnémotechnique permettra l’aliénation des africains en leur enlevant toute conscience d’eux-mêmes afin qu’ils épousent l’idéologie coloniale, c’est-à-dire qu’ils assument eux-mêmes leur oppression et leur exploitation. Cette intériorisation et cette gravure des modèles occidentaux dans la mémoire des peuples va laisser des traces ineffaçables et des séquelles inoubliables au point « d’hypnotiser le système nerveux et intellectuel tout entier »[2]. DIMI en a fait l’expérience douloureuse puisqu’il nous aura confié avoir été victime de bastonnade et de sévères punitions pour avoir malencontreusement fait usage de sa langue maternelle à l’école : le boulou. Ceci est d’autant plus compréhensible car dans l’optique coloniale, le « Nègre ou l’indigène… est une brute ». Il est comme le dit Franz Fanon, « déclaré imperméable à l’éthique, absence de valeurs, mais aussi négation des valeurs…. En ce sens, il est le mal absolu »[3]. C’est pourquoi comme le recommandait déjà Hegel, les sévices corporels et partant l’usage de la violence est salutaire pour lui puisqu’elle lui permet de se réaliser en lui ouvrant les portes de la Civilisation et par conséquent du paradis ou du ciel. Le second bras armé, la doctrine chrétienne à travers l’Eglise aura pour fonction de détruire la personnalité du Négro-Africain d’une part et le génie des peuples d’autre part. Elle se révélera comme étant l’ « opium du peuple » c’est à dire un puissant instrument d’abrutissement des consciences. Ainsi l’alliance mission civilisatrice et évangélisation participe de la conscience européenne. Le politique et l’Eglise sont la recette ayant donné de la saveur à l’économique : le capital.